Cité du Vatican, 12 mars, 2024 / 1:00 AM
Des responsables ukrainiens et des chefs religieux ont critiqué le pape François dans les jours qui ont suivi la déclaration du Saint-Père selon laquelle il serait courageux que l'Ukraine négocie la fin de sa guerre avec la Russie.
Dans un extrait d'une interview accordée à la chaîne suisse RSI, qui sera publiée dans son intégralité le 20 mars, le pape François a suggéré que "le plus fort est celui qui regarde la situation, pense au peuple et a le courage du drapeau blanc, et négocie".
"Quand vous voyez que vous êtes vaincus, que les choses ne vont pas bien, vous devez avoir le courage de négocier", a poursuivi le pape.
"Notre drapeau est jaune et bleu. C'est par ce drapeau que nous vivons, que nous mourrons et que nous vaincrons. Nous ne brandirons jamais d'autres drapeaux", a écrit le ministre ukrainien des affaires étrangères, Dmytro Kuleba, dans un message publié sur X le 10 mars, en réponse aux commentaires du pape.
M. Kuleba a contesté les propos du pape selon lesquels il serait "courageux" de négocier avec la Russie, en écrivant : Le plus fort est celui qui, dans la bataille entre le bien et le mal, se tient du côté du bien plutôt que d'essayer de les mettre sur un pied d'égalité et d'appeler cela des "négociations".
M. Kuleba a également critiqué le Saint-Siège. "En ce qui concerne le drapeau blanc, nous connaissons la stratégie du Vatican depuis la première moitié du XXe siècle", a-t-il déclaré.
"Je demande instamment d'éviter de répéter les erreurs du passé et de soutenir l'Ukraine et son peuple dans leur juste lutte pour la vie", a-t-il ajouté.
L'ambassadeur ukrainien auprès du Saint-Siège, Andrii Yurash, a lui-même réprimandé le pape lors d'une interview accordée le 11 mars à la chaîne NBC : "Personne, à l'époque de la Seconde Guerre mondiale, n'a proposé aux peuples asservis par Hitler ou à ceux qui souffraient ou luttaient contre lui d'entamer des négociations de paix.
L'ambassadeur a suggéré que, tout comme une trêve avec Hitler aurait été synonyme de "suicide et de mort", une trêve avec le président russe Vladimir Poutine serait également synonyme de "suicide et de mort".
Les remarques du pape ont également suscité des réactions de la part des communautés ecclésiales d'Ukraine, notamment du Synode permanent de l'Église gréco-catholique ukrainienne et du Conseil panukrainien des Églises et des organisations religieuses, ce dernier étant une association interreligieuse visant à favoriser le dialogue et à collaborer dans les relations entre l'Église et l'État dans ce pays majoritairement orthodoxe.
"Les Ukrainiens ne peuvent pas se rendre, car la reddition signifie la mort", a écrit le synode permanent de l'Église gréco-catholique ukrainienne dans une déclaration publiée lundi.
"Nonobstant les suggestions de négociations émanant de représentants de différents pays, y compris du Saint-Père lui-même, les Ukrainiens continueront à défendre la liberté et la dignité pour parvenir à une paix juste", poursuit la déclaration.
Soutenant que "les intentions de Poutine et de la Russie sont claires et explicites", le synode a également suggéré que la guerre n'est pas seulement une action unilatérale menée par le gouvernement russe, mais qu'elle est soutenue par "70 % de la population russe" ainsi que par "le patriarche Kirill et l'Église orthodoxe russe".
Le Conseil ukrainien des églises et des organisations religieuses a également publié une déclaration dimanche, "déclarant catégoriquement que personne ne forcera jamais notre peuple à capituler".
"Capituler devant le mal triomphant équivaut à l'effondrement de l'idée universelle de justice, à la trahison des lignes directrices fondamentales qui nous ont été léguées par les grandes traditions spirituelles", poursuit le communiqué.
Le Bureau de presse du Saint-Siège a rapidement nuancé les déclarations du pape tard dans la nuit de samedi à dimanche, suggérant que le pontife de 87 ans "avait l'intention d'appeler à un cessez-le-feu et de relancer le courage de la négociation", ajoutant que "le pape utilise le terme de drapeau blanc, et répond en reprenant l'image proposée par l'interviewer, pour indiquer une cessation des hostilités, une trêve obtenue avec le courage de la négociation".
Le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d'État du Vatican, a également tenu des propos plus clairs dans une interview accordée au Corriere della Sera le lundi 11 mars, affirmant qu'il incombe à la Russie "en tant qu'agresseur" de "mettre fin à l'agression".
"La guerre déclenchée contre l'Ukraine n'est pas l'effet d'une catastrophe naturelle incontrôlable mais de la seule liberté humaine, et la même volonté humaine qui a causé cette tragédie a également la possibilité et la responsabilité de prendre des mesures pour y mettre fin et ouvrir la voie à une solution diplomatique", a déclaré le chef de la diplomatie vaticane.
Toutefois, M. Parolin a réitéré les inquiétudes du pape quant au fait qu'un conflit prolongé pourrait dégénérer en un conflit plus vaste et exacerber une crise humanitaire déjà importante, affirmant que cela entraînerait "de nouvelles souffrances, de nouveaux morts, de nouvelles victimes, de nouvelles destructions".
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