mercredi, 11 décembre 2024 Faire un don
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Fin des protestations contre la nomination de l’archevêque de Juba, l'émérite rompt le silence.

Cathédrale Sainte-Thérèse, Archidiocèse catholique de Juba, Sud Soudan, le lieu où l'archevêque élu Stephen Ameyu devrait être installé le 22 mars 2020

La reconfirmation par le pape François de sa précédente nomination de l'évêque du Soudan du Sud Stephen Ameyu comme nouvel archevêque de Juba devait mettre fin aux controverses autour de la politique de succession dans le seul siège métropolitain de la plus jeune nation du monde.

Cependant, les protestations contre l'archevêque élu ont refait surface, prenant cette fois la forme non seulement des menaces écrites, mais aussi d'une attaque contre des ecclésiastiques basés à Juba, un incident qui a vu l'archevêque émérite, Paolino Lukudu Loro, rompre son silence, condamnant la violence.

Le dimanche après-midi, un groupe de jeunes catholiques rattaché à la paroisse de la cathédrale Sainte Thérèse, Kator, de l'archidiocèse de Juba au Soudan du Sud, identifiés comme membres du groupe ethnique dominant de l'archidiocèse, les Bari, a pris d'assaut la résidence des prêtres de la paroisse, en battant et ont blessé un ecclésiastique tandis que deux d'entre eux ont réussi à s'enfuir.

"Le prêtre a été attaqué dans sa maison et traîné jusqu'à l'église de la cathédrale avant d'être secouru par le personnel de sécurité", a déclaré une source de Juba à ACI Africa, mardi 10 mars en faisant référence à l'attaque contre le père Nicholas Kiri et en poursuivant que : "Les attaquants sont un groupe de jeunes de la paroisse de Kator".

Le père Kiri, blessé lors de l'attaque du dimanche est soigné par la suite dans un hôpital de Juba, devrait superviser le comité organisant la cérémonie d'installation de l'archevêque élu le 22 mars. Le délégué de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples, Mgr Visvaldas Kulbokas, l’avait annoncé lors de la conférence de presse du 6 mars qui s'est tenue à la nonciature apostolique du Sud-Soudan à Juba. 

"J'ai formé un comité, composé de quelques curés, ainsi que de quelques prêtres de l'archidiocèse de Juba, qui occupent des postes administratifs dans cette église locale", a déclaré le diplomate du Vatican, Mgr Kulbokas, aux journalistes à Juba vendredi dernier. Il continue, disant que: "Ce comité sera dirigé par le vicaire épiscopal pour le clergé et les religieux de l'archidiocèse de Juba, le révérend père Nicholas Kiri".

Lors de la conférence de presse, Mgr Kulbokas a annoncé que le pape François avait reconfirmé sa nomination antérieure de Mgr Ameyu comme Pasteur du peuple de Dieu dans l'archidiocèse de Juba, après des mois d'enquêtes suite à une série de lettres de protestation contre l'élévation du prélat sud-soudanais de 56 ans.

"Je suis ici au nom du Saint-Siège, étant délégué par la Congrégation pour l'évangélisation des peuples, agissant sous le mandat du Saint-Père, pour faciliter la préparation et superviser l'installation de Sa Grâce Mgr Stephen Ameyu Martin Mulla comme nouvel archevêque de Juba", a déclaré Mgr Kulbokas, originaire de la Lituanie ce vendredi à la presse.

Il a par la suite ajouté ceci : "Comme vous le savez, cette nomination a été faite et annoncée le 12 décembre 2019, qui a ensuite été suivie par un processus d'enquête concernant certaines allégations qui avaient été présentées par certaines personnes".

De nombreuses sources ont indiqué à ACI Africa qu'une délégation dirigée par le Vatican s'est rendue à Juba, la capitale du Soudan du Sud, la semaine du 6 janvier, pour enquêter sur les accusations portées contre l'archevêque élu et sur le processus ayant conduit à sa nomination.

Dans ces lettres, les manifestants, parmi lesquels des prêtres et des fidèles laïcs, tous issus de la communauté ethnique de Bari, ont affirmé que l'archevêque élu "a deux concubines et six enfants biologiques", qu'un natif de l'archidiocèse aurait été nommé et que certains clercs de l'archidiocèse de Juba, aux côtés de fonctionnaires du gouvernement, avaient conspiré avec les responsables de la nonciature du Soudan du Sud pour faire promouvoir l'évêque du diocèse de Torit, au Soudan du Sud, pour leurs intérêts personnels.

Flanqué du Chargé d'Affaires de la Nonciature Apostolique au Soudan du Sud, Mgr Mark Kadima, Mgr Kulbokas a déclaré aux journalistes de Juba que les enquêtes menées par le Vatican, qui ont impliqué un processus d'examen approfondi et des interviews sous serment, ont conclu que "ces graves allégations n'ont aucun fondement".

"Le processus (d'enquête) a été fait de manière très concrète, en essayant de comprendre les allégations et les fondements, les faits de ces allégations et les fondements de ces allégations", a déclaré Mgr Kulbokas lors de la conférence de presse du 6 mars à Juba, en réponse à un journaliste qui s'est enquis des conclusions de l'enquête, dont le Saint-Siège a été le fer de lance.

"Lorsque ceux qui ont mené cette enquête recueillent des informations, ils transmettent tous les documents, non seulement les conclusions mais aussi ce que les personnes de l'enquête ont dit concrètement", a révélé le diplomate du Vatican.

Dans le cas des enquêtes de Juba, "un effort a été fait pour interroger directement ... ceux qui présentaient ces allégations afin de comprendre qui et pourquoi ... parce que les allégations étaient très graves", a encore révélé le délégué papal basé à Rome.

Il a ajouté, faisant toujours référence à l'examen des allégations contre l'archevêque élu, que : "Dans cette affaire, l'enquête a été menée de la manière la plus détaillée possible. Normalement, nous ne faisons pas de deuxième enquête mais, dans ce cas, la deuxième enquête a été faite de manière très sérieuse".

"Le Saint-Père a été informé des allégations et des réponses des personnes qui ont présenté les allégations au cours du processus d'enquête et le Saint-Père a reconnu que le processus d'évaluation s'était déroulé correctement et il a confirmé Mgr Stephen Ameyu comme archevêque de Juba", a révélé Mgr Kulbokas.

Il a conclu disant que : "Cela signifie que le Saint-Père a considéré que ces graves allégations n'étaient pas fondées".

La décision du pape François, à l'issue d'un processus d'enquête rigoureux, ne s'est pas bien passée pour une partie des Bari, la tribu à majorité simple de Juba.

L'attaque du dimanche contre les prêtres basés à la cathédrale Sainte-Thérèse et la lettre de menace publiée par ceux qui se décrivent comme "les représentants de divers groupes de fidèles indigènes (clergé, chefs, femmes et jeunes) de l'archidiocèse de Juba" semblent démontrer un manque d'acceptation de la décision papale et une rébellion ouverte des protestataires.

"Cette installation ne se fera pas sous notre surveillance. Le Nonce ou ses substituts ne peuvent installer Mgr Ameyu sur la Cathèdre de Juba que sur nos cadavres", peut-on lire en partie dans le communiqué de presse daté du dimanche 8 mars et distribué le lundi 9 mars, après qu'une conférence de presse demandée plus tôt dans la journée pour présenter le communiqué n'ait pas eu lieu.

Signé par quatre laïcs catholiques de l'archidiocèse de Juba, les protestataires ignorent le récit du Saint-Siège et affirment que les fonctionnaires du Vatican ont discrédité "les témoignages et les preuves de 36 personnes données sous serment".

"Nous crions à la faute parce que quelque chose ne va pas avec ce candidat et que quelque chose d'autre a mal tourné dans le processus de nomination", déclarent les signataires du communiqué de presse du 8 mars et ajoutent : "Les responsables du Vatican à Juba n'ont pas dit la vérité au Saint-Père sur cette affaire".

"Nous voulons que l'affaire soit réexaminée par une enquête indépendante", font appel les manifestants, exprimant leur allégeance au Saint-Père comme celui à qui, ils "doivent une obéissance absolue ... en tant que Successeur de Pierre et Vicaire du Christ sur terre".

(L'histoire continue ci-dessous)

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Cependant, alors que Mgr Kulbokas, le délégué de la Congrégation du Saint-Siège pour l'évangélisation des peuples, a clairement indiqué lors de la conférence de presse du 6 mars qu'il se trouvait à Juba "agissant sous le mandat du Saint-Père", les manifestants mettent en doute sa crédibilité et qualifient le communiqué de presse qu'il a présenté aux journalistes de "fausses nouvelles fabriquées à Nairobi", où réside le nonce apostolique au Soudan du Sud, Bert van Megen.

"Nous ne comprenons pas comment Mgr Kulbokas peut être délégué par la Congrégation pour l'évangélisation des peuples alors que le Préfet de cette même Congrégation, Son Éminence, le Cardinal Luis Antonio TAGLE, vient de demander à l'Administrateur apostolique de Juba de se rendre à Rome, le 14 mars 2020, pour "examiner les questions soulevées par la récente nomination de l'Archevêque de Juba, Mgr Stephen Ameyu", sondent les manifestants.

La lettre de quatre pages contient une série de menaces avant l'installation de l'archevêque élu, qu'ils qualifient de "catastrophe".

"La catastrophe qui nous frappe étant (pire) que le Coronavirus, nous déclarons par la présente que toutes les églises et centres de prière sont fermés. Tout prêtre ou fidèle laïc entrant dans une église le fera à ses propres risques", menacent les manifestants.

Ils ajoutent : "Toutes les activités liées à la préparation de l'installation d'Ameyu sont déclarées illégales et doivent être traitées en conséquence. Nous conseillons au public de ne pas prendre autant de risques et ce, pour rien".

Les signataires du communiqué de presse du 8 mars déclarent le retrait de "toutes les terres qui ont été données à l'Église catholique ou qui étaient sur le point de l'être".

"Les chefs et les avocats ont pour instruction de faire appliquer cette résolution communautaire par les procédures légales", écrivent les membres du Bari, l'indigène de Juba, en référence à leur menace de reprendre les terres données à l'archidiocèse catholique de Juba. 

"Il n'y a absolument aucune chance que Mgr Stephen Ameyu devienne un jour archevêque de Juba, même s'il nous est imposé le 22 mars 2020", déclarent les manifestants en dernière page de leur communiqué de presse.

"L'installation forcée, même si elle réussit, ne sera certainement pas la fin de l'histoire", menacent-ils dans leur conclusion dans la déclaration qui met en évidence sept lettres de protestation précédentes.

Alors que l'archevêque émérite, Paolino Lukudu, semblait silencieux face aux précédentes lettres de protestation, l'attaque du 8 mars contre les clercs de la paroisse de la cathédrale Sainte Thérèse de Juba et la lettre subséquente des membres de sa communauté ethnique ont attiré son attention.

Dans le communiqué de presse du lundi 9 mars, Mgr Lukudu exprime sa tristesse en apprenant la nouvelle de l'attaque des clercs qui a entraîné une confrontation entre certains jeunes et des agents de sécurité à la paroisse de la cathédrale.

"J'ai appris et vu que certains fidèles et certains membres du personnel de l'église ont subi des blessures", déclare l'archevêque émérite et ajoute : "Grâce à Dieu, aucune vie n'a été perdue. Je suis malheureux d'entendre parler de menaces et d'hostilités violentes".

"J'exhorte tous les prêtres diocésains, les religieux et les fidèles de l'archidiocèse catholique de Juba à s'abstenir de toute activité violente et (à s'abstenir) de menaces et d'hostilités violentes", lance le prélat Sud-soudanais de 79 ans.

Faisant référence aux deux prêtres qui ont fui leur résidence après l'attaque du dimanche après-midi, le membre des Missionnaires Comboniens dit : "Que les prêtres qui ont quitté leur communauté reviennent immédiatement".

Dans sa déclaration, il encourage le clergé et les religieux de l'archidiocèse qu'il administre depuis février 1983 à "travailler ensemble pour unifier nos fidèles".

"Nous devons éviter les politiques de division et les propos imprudents qui conduisent à l'animosité et à la violence", ajoute-t-il, et il exhorte "nos jeunes à ne pas se livrer à des actes de violence contre quelque groupe que ce soit".

"Nous sommes capables de résoudre nos propres problèmes et nos différences par le dialogue", déclare le prélat.

Une source à Juba a salué la décision de l'archevêque émérite de rompre son silence sur les protestations contre son successeur en disant : "C'est ce qu'il (Mgr Lukudu) aurait dû faire il y a longtemps".

"Les manifestants le respectent. La paix est chez nous maintenant", a déclaré la source à ACI Afrique mardi 10 mars.

Peter Mapuor Makur, correspondant de l'ACI Afrique au Sud-Soudan, a contribué à ce reportage.

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