lundi, 25 novembre 2024 Faire un don
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La Cour européenne juge que le Vatican ne peut être poursuivi devant les tribunaux locaux pour abus commis par des clercs

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a statué mardi que le Vatican ne peut être poursuivi devant les tribunaux locaux pour les actes d'abuseurs cléricaux, car il bénéficie d'une immunité souveraine.

La Cour internationale qui interprète la Convention européenne des droits de l'homme a rendu cet arrêt le 12 octobre. C'est la première fois que la Cour se penche sur une affaire touchant à l'immunité du Saint-Siège.

Une chambre de sept juges a décidé, par six voix contre une, que les tribunaux belges n'ont pas violé l'article 6 § 1 de la convention, relatif au droit d'accès à un tribunal, lorsqu'ils ont décliné leur compétence à l'égard du Vatican.

L'affaire, connue sous le nom de J.C. et autres c. Belgique, a été introduite par 24 ressortissants belges, français et néerlandais contre le Vatican, ainsi que des dirigeants et associations catholiques en Belgique.

Les requérants, qui ont déclaré avoir été abusés sexuellement par des prêtres catholiques lorsqu'ils étaient enfants, ont cherché à intenter une action civile contre le Vatican, en faisant valoir qu'il avait traité les abus cléricaux d'une "manière structurellement déficiente".

Un communiqué de presse de la CEDH du 12 octobre a déclaré : "La Cour a estimé que le rejet de la procédure par les tribunaux belges en se déclarant incompétents pour connaître de l'action en responsabilité civile intentée par les requérants contre le Saint-Siège n'avait pas dérogé aux principes généralement reconnus du droit international en matière d'immunité des États, et que la restriction du droit d'accès à un tribunal ne pouvait donc être considérée comme disproportionnée par rapport aux buts légitimes poursuivis."

L'arrêt de la Chambre n'est pas définitif et peut être renvoyé dans un délai de trois mois devant la Grande Chambre de la Cour, où un panel de cinq juges décidera d'entendre l'affaire et de rendre un arrêt définitif.

Si la Grande Chambre rejette la demande de renvoi, l'arrêt de la Chambre devient définitif.

Les requérants ont introduit un recours collectif devant le tribunal de première instance de Gand, dans le nord-ouest de la Belgique, en juillet 2011.

Ils ont demandé que les défendeurs soient tenus conjointement et solidairement responsables des souffrances qu'ils ont subies du fait de prêtres et de membres d'ordres religieux, réclamant une indemnisation de 10 000 euros (environ 11 500 dollars) chacun.

Le tribunal a décliné sa compétence à l'égard du Saint-Siège en octobre 2013.

La cour d'appel de Gand a confirmé le jugement en février 2016. En août de la même année, un avocat de la Cour de cassation a déclaré qu'un recours devant la cour suprême du système judiciaire belge avait peu de chances d'aboutir.

Vingt des plaignants ont obtenu une indemnisation via un centre d'arbitrage pour les plaintes pour abus sexuels au sein de l'Église. Quatre n'ont pas fait de demande.

Le groupe a déposé une requête auprès de la CEDH le 2 février 2017, arguant qu'en reconnaissant l'immunité étatique de juridiction du Saint-Siège, les tribunaux locaux les avaient empêchés de faire valoir leurs revendications civiles.

Les juges de la CEDH ont reconnu que le Saint-Siège était "reconnu internationalement comme ayant les attributs communs d'un souverain étranger", notant qu'il entretient des relations diplomatiques avec quelque 185 États dans le monde.

Les relations diplomatiques du Vatican avec la Belgique remontent à 1832.

Les juges ont noté que les requérants avaient plaidé pour une exception à la règle de l'immunité s'appliquant aux procédures liées à "une action en réparation pécuniaire en cas de décès ou d'atteinte à l'intégrité physique d'une personne, ou en cas de dommage ou de perte d'un bien corporel."

La Cour d'appel avait rejeté l'exception pour plusieurs motifs, indique le communiqué de presse de la CEDH. La cour a déclaré que la faute des évêques belges ne pouvait pas être attribuée au Saint-Siège car le pape n'était pas "le principal en relation avec les évêques" et la faute présumée du Vatican a été commise à Rome et non en Belgique.

"Il n'appartenait pas à la [CEDH] de substituer sa propre appréciation à celle des juridictions nationales, puisque leur appréciation sur ce point n'avait pas été arbitraire ou manifestement déraisonnable", précise le communiqué.

Dans une opinion dissidente, le juge albanais Darian Pavli s'est demandé pourquoi les tribunaux belges avaient "accepté en bloc" l'affirmation selon laquelle "il n'y avait pas de relation mandant/mandataire entre le Saint-Siège et les évêques".

"Les tribunaux nationaux ont l'obligation d'exposer de manière adéquate les raisons factuelles et juridiques de leur décision. À mon avis, les tribunaux belges ne l'ont pas fait en ce qui concerne l'allégation de responsabilité du fait d'autrui, et j'aurais donc conclu à une violation de l'article 6 de la Convention dans cette affaire", a écrit M. Pavli.

Le Saint-Siège a répondu avec succès à des affaires similaires devant les tribunaux américains.

Un juge fédéral de Portland, dans l'Oregon, a rejeté un procès pour abus sexuels contre le Saint-Siège en 2012, au motif que le Vatican n'était pas l'employeur d'un ancien prêtre accusé et ne pouvait être tenu financièrement responsable des abus.

Jeffrey Lena, avocat du Saint-Siège, a qualifié la décision rendue dans l'affaire connue sous le nom de Doe v. Holy See de "particulièrement importante".

(L'histoire continue ci-dessous)

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