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Une entité chrétienne interpelle la Commission africaine sur les violations des droits religieux et des femmes au Soudan

Christian Solidarity Worldwide (CSW), une organisation britannique de défense des droits de l’homme spécialisée dans la liberté religieuse et la défense des personnes persécutées pour leur foi chrétienne, pour d’autres croyances religieuses ou même pour leur absence de croyance, a adressé une pétition à la Mission conjointe hybride d’établissement des faits (FFM) de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) afin de dénoncer les violations de la liberté religieuse et les violences basées sur le genre au Soudan.

Dans un document consulté par ACI Afrique le mercredi 19 février, CSW affirme que le conflit en cours entre les Forces armées soudanaises (SAF) et les Forces de soutien rapide (RSF, anciennement milice Janjaweed) continue d’avoir un impact dévastateur sur les droits de l’homme.

« Cette soumission vise à attirer l’attention de la Mission conjointe hybride d’établissement des faits (FFM) de la CADHP sur la situation actuelle des droits de l’homme au Soudan, notamment la liberté de religion ou de croyance (FoRB) ainsi que les signalements de violences sexuelles et basées sur le genre », déclarent les responsables de CSW en faisant référence aux effets du conflit violent qui a éclaté le 15 avril 2023.

Ils expliquent : « De graves violations ont été signalées dans plusieurs villes des États du Darfour central, du Nord, du Sud et de l’Ouest, ainsi qu’à Khartoum, dans l’État du Nord et dans l’État du Kordofan du Nord. Parmi ces violations figurent des violences sexuelles contre les femmes et les filles, le recrutement forcé de civils, y compris d’enfants, ainsi que les arrestations et les fausses accusations visant des volontaires des Comités de résistance, qui restent neutres tout en organisant un soutien logistique pour les services médicaux destinés à tous les blessés. »

« Les chrétiens constituent une communauté minoritaire particulièrement vulnérable. Il y a eu des signalements d’arrestations et de détentions de chrétiens ayant fui les zones contrôlées par les RSF », indiquent les responsables de CSW dans le document daté de février 2025.

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Dans les zones sous contrôle des RSF, ajoutent-ils, « des chrétiens rapportent avoir été contraints de se convertir ou incités à le faire en échange d’une aide humanitaire vitale et de leur sécurité, ou encore détenus lorsqu’ils tentaient de fuir. »

CSW s’inquiète également du « ciblage délibéré des lieux de culte par les deux parties au conflit, en violation du droit national et international ainsi que du droit humanitaire international. »

De telles attaques, déclarent les responsables de l’organisation chrétienne, « pourraient également constituer un crime de guerre, en particulier lorsque ces lieux sont utilisés pour répondre à la montée critique des besoins humanitaires générés par le conflit. »

Outre les attaques contre les chrétiens, CSW signale que des mosquées ont aussi « été attaquées, notamment par des bombardements signalés dans les quartiers d’Alazhari et de Burri Al Daraisa à Khartoum. »

Les responsables de CSW déplorent en outre que « des églises ont également été délibérément ciblées ou utilisées comme bases militaires depuis le début du conflit en avril 2023. Ces violations sont en cohérence avec les actions menées par les dirigeants des SAF et des RSF après leur coup d’État conjoint d’octobre 2021. »

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« Une coupure d’Internet et des communications est en place depuis le 2 février 2024 après que les RSF auraient pris le contrôle des centres de données des fournisseurs de services Internet à Khartoum », indique encore CSW dans sa soumission.

L’interruption d’Internet compromet sérieusement les efforts humanitaires dans le pays, car les organisations locales et internationales ne peuvent plus communiquer efficacement, souligne l’organisation britannique de défense des droits de l’homme.

Le conflit, ajoute CSW, a déjà conduit à « un niveau record de déplacements internes dans le monde. »

Les installations et personnels médicaux ne sont pas non plus épargnés par les violences. « Des signalements constants font état d’attaques contre des établissements médicaux par les deux parties belligérantes, en violation du droit humanitaire international », affirment les responsables de CSW, ajoutant que « les attaques contre le personnel médical et les pénuries de nourriture, d’eau et de médicaments essentiels sont tout aussi préoccupantes. »

Dans les zones résidentielles, CSW déplore que « les civils restent en grave danger en raison des bombardements aériens et des incursions à domicile par des hommes armés cherchant à utiliser les toits des habitations comme postes d’observation, tout en pillant largement. »

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La soumission de CSW exprime également des craintes pour « les membres des comités de résistance, les journalistes, les avocats et les opposants politiques, qui risquent particulièrement la détention, la surveillance ou le ciblage. »

Le document met aussi en évidence l’ampleur du conflit, qui selon CSW « s’est étendu à tout le pays, avec des tensions qui s’intensifient à Khartoum et à Omdurman alors que les SAF tentent de reprendre les quartiers contrôlés par les RSF. »

CSW appelle la Mission conjointe hybride d’établissement des faits (FFM) de la CADHP à « condamner fermement les attaques contre les civils, y compris les dirigeants religieux, et à mener des enquêtes sur ces abus afin de garantir que les responsables rendent des comptes. »

L’organisation britannique souhaite également que la commission africaine des droits de l’homme soutienne les enquêtes sur la destruction des lieux de culte et veille à ce que les coupables soient traduits en justice.

CSW demande en outre à la FFM d’exhorter les SAF à cesser les arrestations et détentions de chrétiens ayant fui les zones sous contrôle des RSF, et les RSF à cesser d’arrêter, de détenir ou de forcer les chrétiens à se convertir dans les zones qu’ils contrôlent.

Elle réclame enfin que « les travailleurs humanitaires bénéficient d’une protection adéquate, car ils opèrent dans des conditions extrêmement risquées. »

Le mardi 18 février, les RSF se seraient réunies au Centre international de conférence Kenyatta (KICC) dans la capitale kényane, Nairobi, pour délibérer sur la formation d’un « gouvernement de paix et d’unité » pour le Soudan.

Cette initiative a suscité une vive controverse, le gouvernement soudanais condamnant le Kenya pour avoir accueilli ces délibérations, les qualifiant de violation du droit international et d’acte favorisant le démembrement d’un État membre de l’Union africaine.

Le ministère soudanais des Affaires étrangères a exprimé son profond regret face à ces actions du Kenya, accusant le gouvernement kényan de complicité dans les crimes présumés des RSF, notamment le génocide et les violences ethniques.

Silas Isenjia