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Les prêtres catholiques du Nigeria s'inquiètent de la sécurité de Mgr Anagbe, évêque du diocèse de Makurdi

Les membres de l’Association des prêtres diocésains catholiques du Nigeria (NCDPA) expriment de « graves inquiétudes » concernant la sécurité de Mgr Wilfred Chikpa Anagbe, évêque du diocèse catholique de Makurdi, suite à ses interventions à l’étranger sur la persécution des chrétiens dans la nation la plus peuplée d’Afrique.

Dans une déclaration en date du 10 avril, les membres de la NCDPA réagissent aux « rumeurs persistantes » selon lesquelles le gouvernement nigérian prévoirait « d’arrêter ou d’intimider Mgr Anagbe », actuellement à l’étranger, à son retour dans le pays.

Le 12 mars, Mgr Anagbe avait lancé un appel passionné aux États-Unis pour qu’ils reclassent le Nigeria comme pays particulièrement préoccupant (CPC) en raison de la recrudescence des attaques islamistes contre les chrétiens dans le pays.

S’adressant à la Sous-commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants américaine sur l’Afrique, l’évêque nigérian a témoigné des atrocités commises contre les chrétiens au Nigeria, notamment dans la région du Middle Belt et dans l’État de Benue.

Mgr Anagbe a détaillé la persécution des chrétiens, en particulier dans les régions du nord et du centre du Nigeria, où il affirme qu’un agenda vise à « réduire puis à éliminer l’identité chrétienne » du pays.

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L’ordinaire local du diocèse de Makurdi, connu pour ses prises de position dénonçant un génocide contre les chrétiens, notamment la fermeture de paroisses catholiques dans son diocèse et les déplacements massifs causés par les violences des éleveurs peuls islamistes, a affirmé que le classement du Nigeria comme CPC obligerait le gouvernement nigérian à rendre des comptes sur la situation des chrétiens.

Il a aussi évoqué l’augmentation des enlèvements de prêtres catholiques dans le nord du pays pour des motifs autres que les rançons, ainsi que la fermeture forcée de toutes les écoles dans certaines zones, y compris les établissements catholiques, pendant tout le mois de Ramadan.

Ce discours a provoqué une réaction virulente des leaders musulmans du pays, qui ont qualifié le témoignage de l’évêque de « non fondé ». De son côté, le ministère nigérian des Affaires étrangères a déclaré, dans un communiqué du 14 mars, que le Nigeria est « un phare de tolérance religieuse et de coexistence en Afrique ».

Le ministère a également « fermement rejeté » toute tentative de « désignation erronée » du Nigeria, soulignant son statut de nation la plus peuplée du continent.

Le 28 mars, le P. Remigius Ihyula, du diocèse de Makurdi, aurait reçu un message d’une ambassade à Abuja l’avertissant qu’un mandat d’arrêt pourrait viser Mgr Anagbe à son retour au Nigeria.

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Un rapport publié le 9 avril indique que Mgr Anagbe se trouvait en Écosse, où il a prononcé un discours lors d’une conférence organisée par la fondation catholique Aide à l’Église en détresse (AED) internationale.

La conférence portait sur « le sort des chrétiens en Afrique, notamment dans le nord du Nigeria, où les violences et la persécution religieuse continuent de faire des victimes innocentes ».

Dans leur déclaration du 10 avril, les membres de la NCDPA mettent en garde contre toute tentative de harcèlement ou d’arrestation de Mgr Anagbe ou du P. Ihyula, connu pour son engagement humanitaire en faveur des personnes déplacées.

« Il est profondément troublant d’entendre des rumeurs selon lesquelles le gouvernement nigérian envisagerait d’arrêter ou d’intimider Mgr Anagbe à son retour. Si cela est vrai, ce serait une grave atteinte à la liberté d’expression, à la liberté religieuse et au droit fondamental d’un pasteur de défendre son troupeau », déclarent les prêtres catholiques du Nigeria.

Ils « condamnent fermement toute tentative de harceler, de réduire au silence ou de nuire à Mgr Anagbe ou à tout autre responsable religieux osant dire la vérité au pouvoir ».

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« Mgr Anagbe, connu pour son engagement sans faille en faveur de la justice, de la paix et de la sainteté de la vie humaine, a toujours utilisé sa voix prophétique pour dénoncer les atrocités commises contre les communautés sans défense, en particulier dans la région du Middle Belt », poursuivent les membres de la NCDPA.

Ils soulignent que « sa sollicitude pastorale envers les souffrants et les déplacés, en particulier les victimes des attaques de bergers violents et des milices, n’est pas seulement un devoir moral, mais une réponse claire à l’appel de l’Évangile à défendre la dignité humaine ».

« Sa position ferme, ancrée dans la vérité et l’Évangile de justice et de paix, a éveillé chez beaucoup la nécessité urgente de responsabilité et d’action », affirment les membres de la NCDPA.

Ils expriment leur solidarité avec le clergé du diocèse de Makurdi, affirmant : « Nous nous tenons fermement aux côtés de notre évêque. Nous affirmons que Mgr Anagbe a dit la vérité, une vérité que beaucoup endurent en silence. »

« Notre peuple est tué et chassé de ses terres ancestrales chaque jour, ses moyens de subsistance détruits, ses cultures dévorées par les vaches. Les maisons et les églises sont incendiées. Où est le mensonge dans ce que nous avons subi depuis 2001 ? Depuis son ordination épiscopale en 2014, notre évêque n’a cessé de plaider pour la justice en faveur de son peuple souffrant », poursuivent-ils.

Ils ajoutent : « Nous faisons face à des intrus — les tueurs peuls et les bandits — qui ne nous veulent aucun bien, et nous voulons qu’ils quittent nos terres. Il ne s’agit pas d’une personne en particulier, mais de la liberté et de la sécurité de notre peuple. »

« Cibler l’évêque pour le persécuter reviendrait à attaquer la vérité elle-même et à nier les massacres et les souffrances actuels de milliers de déplacés dont la vie a été bouleversée par la violence », affirment-ils.

Dans leur déclaration du 11 avril, les prêtres catholiques du Nigeria exigent « une garantie immédiate de sécurité et de liberté pour Mgr Wilfred Anagbe, aujourd’hui et à son retour au Nigeria ».

Ils appellent le gouvernement nigérian et les services de sécurité à « respecter ses droits en tant que citoyen, prêtre et leader moral à s’exprimer sur les problèmes qui affectent son peuple, sans crainte d’arrestation ni de harcèlement ».

Les membres de la NCDPA lancent également un appel à la Conférence des évêques catholiques du Nigeria (CBCN), à tous les responsables religieux, aux organisations de la société civile et à la communauté internationale pour « qu’ils soient vigilants et proactifs afin de garantir qu’aucun mal ne soit fait à notre évêque et au P. Ihyula ».

Ils rappellent aux autorités que « faire taire les voix de la conscience ne fait qu’approfondir les blessures de l’injustice et renforcer les auteurs de violences ».

« La voix du berger ne doit pas être réduite au silence. Le cri des opprimés ne doit pas être ignoré. La vérité n’est pas un crime et ne doit jamais être criminalisée. Plaider pour la paix et la justice ne devrait jamais être réprimé », insistent les membres de la NCDPA.

Ils concluent : « Nous sommes aux côtés de Mgr Wilfred Anagbe. Nous défendons la vérité. Nous défendons la justice. Nous défendons le peuple de l’État de Benue et toutes les communautés persécutées du Nigeria. »

« Nous restons unis dans la prière, la solidarité et le soutien indéfectible à notre évêque et à toutes les victimes d’injustice à travers notre terre. »

ACI Afrique