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Les chefs d'église à l’ile Maurice préoccupés par le projet de loi COVID-19, appel au dialogue.

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Les membres de la Commission épiscopale pour la justice et la paix (CJP) à l’ile Maurice ont exprimé leur inquiétude concernant deux projets de loi sur la lutte contre COVID-19 présentés au parlement et ont appelé les autorités du pays à établir un forum de dialogue avec toutes les parties prenantes.

« Le Gouvernement mauricien a présenté hier deux projets de loi qui ont pour but de contrer l’impact du Covid-19. Nous craignons que les lois d’exception que le Gouvernement se propose de faire voter à l’Assemblée ce vendredi, génèrent dans la population une inquiétude qui pourrait déboucher sur une crise sociale de plus grande ampleur. », ont déclaré les membres du CJP dans une déclaration publiée jeudi 14 mai.

Les membres de CJP ont ajouté en référence aux projets de loi : « Cette démarche honore le rôle des autorités politiques en tant que législateurs et nous nous devons de le saluer et de le respecter. En même temps, nous ne pouvons pas mettre sous silence des sentiments que nous partageons avec la population ».

Les deux projets de loi devraient modifier un certain nombre de textes afin de tenir compte de l'impact du nouveau coronavirus, a indiqué le gouvernement, annonçant le dimanche 10 mai que le projet de loi sur COVID-19  (Miscellaneous Provisions) et le Quarantine Bill  seront votés à l'Assemblée nationale, le vendredi 15 mai 2020. Les deux projets de loi ont été présentés par le Premier ministre du pays, Pravind Kumar Jugnauth, le 13 mai.

Les membres du CJP ont attiré l'attention des autorités gouvernementales sur quatre aspects des projets de loi qu'ils « considèrent comme plus sensibles ».

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« La précipitation avec laquelle ces amendements sont présentés aux fins de vote à l’Assemblée ne donne pas suffisamment de temps et de place au dialogue. Des amendements de cette ampleur touchant à la sécurité de l’emploi et à l’effondrement possible des entreprises, à l’équilibre de la dette publique et à la liberté des citoyens demanderaient plus de temps pour évaluer les enjeux et un engagement de toute la Nation », ont déclaré les responsables de l'Église catholique.

Dans son discours à l'Assemblée nationale sur le projet de loi COVID-19, mercredi 13 mai, M. Jugnauth a déclaré que les lois proposées ont été élaborées dans le but de conserver le plus grand nombre d'emplois possible et de s'assurer que le gouvernement est suffisamment équipé pour répondre à cette situation sans précédent résultant de la pandémie du COVID-19.

Le Premier ministre a également lancé un appel à tous les travailleurs pour qu'ils comprennent le raisonnement qui sous-tend les amendements proposés, en déclarant : « Je suis convaincu que leurs sacrifices dans ces circonstances exceptionnelles nous aideront sans aucun doute à nous rassembler en tant que nation pour sauver des emplois et surmonter avec succès cette crise ».

La direction du CJP n'est pas convaincue par l'argument du Premier ministre et prévoit un conflit entre le gouvernement et les citoyens ordinaires de la nation insulaire de l'Océan Indien. 

« Pouvons-nous nous payer le luxe d’un désaccord massif ou d’une incompréhension d’une large partie de la population alors que nous nous devons faire face à une crise sans précédent ? «Quelle assurance avons-nous à propos de la durée des lois d’exception ? Combien de temps dureront-elles ? s'interrogent les dirigeants du CJP en ajoutant : « Car, en effet, la grande tentation serait qu’une fois adoptées, ces deux lois installent de nouvelles habitudes au sein de la conduite de l’économie, et qu’à la longue, les décideurs de ce secteur ne veuillent plus les perdre ».

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Les membres du CJP s'inquiètent également des « pouvoirs étendus à conférer à la police » en se demandant s'ils sont limités dans le temps et s'ils sont également limités au domaine de la santé en temps de pandémie.

« Les amendes disproportionnées ajoutées à l’inscription à vie du délit sur les certificats de moralité, passeports pour obtenir un travail, sont aussi décriées. Devant les violences affreuses ayant conduit récemment à la mort de prisonniers qui étaient sous le contrôle des autorités, la population exprime des appréhensions », ont déclaré les responsables de l'Église.

Ils s'inquiètent également des droits des travailleurs après l'adoption des projets de loi. 

« Beaucoup s'inquiètent de la possibilité de perdre leur emploi à tout moment », ont-ils déclaré et demandé, « Comment ceux qui sont ou seront au chômage ou techniquement au chômage peuvent-ils être soutenus ?

Face à ces préoccupations, la direction du CJP a appelé le gouvernement à créer « un forum de dialogue pour entendre les préoccupations de la société civile, leurs objections et pour pouvoir y répondre ».

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Le forum de dialogue, ont-ils dit, « contribuera surtout à rassurer la population à un moment où, face à la transition vers le retour au travail et à une période d'après-guerre, le plus important serait peut-être d'inspirer confiance et espoir en un avenir meilleur pour notre belle société mauricienne ».

L'île Maurice a déclaré le 11 mai avoir récupéré la totalité de ses infections par coronavirus. La page officielle du COVID-19 de l'île indique que 322 personnes se sont rétablies sur les 332 cas confirmés et que 10 décès ont été enregistrés.

Dans leur déclaration, les responsables de l'Église ont félicité le gouvernement mauricien pour sa lutte réussie contre COVID-19.

« Jusqu'à présent, le gouvernement a très bien géré la pandémie du COVID-19. Il a pris des mesures courageuses dès le début et a mobilisé toutes les forces de manière proactive, de sorte qu'à ce jour, la propagation du virus à Maurice semble être sous contrôle », ont-ils déclaré.

 « Alors que le pays prend un tournant décisif dans la lutte contre le coronavirus, il serait regrettable que les autorités perdent le soutien dont la population a fait preuve jusqu'à présent », ont-ils conclu.

Jude Atemanke

Jude Atemanke est un journaliste camerounais passionné par la communication de l'Église catholique. Il est titulaire d'une licence en journalisme et communication de masse de l'Université de Buea au Cameroun. Actuellement, Jude est journaliste pour ACI Afrique.