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Le diocèse catholique de Torit, au Soudan du Sud, condamne l'attaque meurtrière contre une paroisse et demande justice

Le diocèse catholique de Torit a condamné l'attaque violente du 26 mars contre la paroisse Notre-Dame de l'Assomption à Loa, dans le comté de Magwi, au cours de laquelle des membres des Forces de défense du peuple sud-soudanais (SSPDF) auraient tué un civil, blessé un autre et profané des biens de l’Église.

Le Soudan du Sud connaît un regain de conflit entre le Mouvement de libération du peuple soudanais en opposition (SPLM-IO) et les SSPDF, à la suite de l'arrestation de plusieurs dirigeants politiques, dont le premier vice-président, le Dr Riek Machar Teny.

Dans une déclaration partagée avec ACI Afrique le jeudi 3 avril, l'Ordinaire du lieu du diocèse de Torit déclare : « Le diocèse catholique de Torit, avec une profonde préoccupation, proteste et condamne les récents actes de meurtre, de menaces et d'irrespect commis contre notre personnel ecclésiastique, les lieux sacrés et la communauté paroissiale de Notre-Dame de l'Assomption. »

« Cet acte de violence a été commis par des membres de l’unité des Forces de défense du peuple sud-soudanais (SSPDF), stationnée au carrefour de la paroisse de Loa, également appelée Okodu Maria », affirme Mgr Emmanuel Bernardino Lowi Napeta dans la déclaration datée du 3 avril.

Mgr Napeta raconte que ce jour-là, vers 17 heures, des soldats des SSPDF ont pris d'assaut l'enceinte de la paroisse et ont ouvert le feu, tuant un civil et blessant un autre.

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« Dans le processus, les soldats ont également tiré et atteint la fenêtre et les murs de la maison des prêtres », précise-t-il.

L’évêque catholique de 51 ans, qui a été consacré évêque de Torit en janvier 2023, poursuit : « Dans une tentative de dissimuler leur acte, les soldats ont emporté et caché le corps, et ont recouvert le sang sur le sol avec de la terre afin d’éliminer toute preuve médico-légale. »

« Jusqu'à aujourd'hui, l'endroit où se trouve le corps demeure inconnu », ajoute-t-il, déplorant en outre que lors de l’attaque, le personnel ecclésiastique, les employés et les habitants de la région aient été soumis à des intimidations, des menaces et des interrogatoires.

L'évêque catholique sud-soudanais affirme que l'incident n'a pas seulement perturbé les activités paroissiales, mais a également semé la peur et l'anxiété parmi la population.

Mgr Napeta souligne que l'intrusion non autorisée des SSPDF dans les lieux sacrés de l'Église constitue « une grave violation de sa sainteté, de sa neutralité, de sa sécurité et des droits de notre personnel. »

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« Cette action viole également le droit des villageois à vivre paisiblement dans leurs localités. Elle est aussi contraire à l'article 53 du Protocole additionnel 1 de 1977 du Droit international humanitaire, qui interdit les actes d’hostilité contre les œuvres d'art ou les lieux de culte constituant le patrimoine culturel ou spirituel des peuples. »

Mgr Napeta précise que « en tant qu'Église engagée pour la paix, la justice et le service de l’humanité, nous condamnons avec la plus grande fermeté le meurtre qui a eu lieu dans l’enceinte de l’Église ainsi que le refus d’une sépulture décente pour le défunt. »

« L’engagement du diocèse catholique de Torit à promouvoir la justice et la coexistence pacifique est bien établi et connu de l’ensemble des dirigeants du gouvernement du Soudan du Sud. Le diocèse rejette également les ordres des soldats interdisant aux prêtres et aux agents pastoraux de résider à Loa », affirme l’évêque catholique.

Il poursuit : « Cet incident ne constitue pas seulement une attaque contre l’espace physique de l’Église, mais aussi une atteinte aux droits fondamentaux à la liberté religieuse, à la dignité et à la sécurité du peuple du diocèse catholique de Torit. »

En réponse, l'Ordinaire local du diocèse de Torit appelle à « une enquête immédiate et impartiale sur l'incident, l’identification et la responsabilisation des militaires impliqués. »

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Le dirigeant de l’Église catholique exige également « des garanties concrètes et des protocoles clairs de la part des SSPDF pour empêcher que de tels incidents ne se reproduisent. La restitution immédiate du corps à la famille pour le deuil et une sépulture digne. »

Il exhorte le gouvernement de l'État d'Équatoria oriental à « déployer des forces de sécurité pour protéger les biens de la paroisse de Loa. »

Mgr Napeta demande également la publication d’« excuses officielles au diocèse catholique de Torit pour l’attaque qui a eu lieu. »

« Le diocèse de Torit attend de nos forces armées, qui ont le mandat de protéger les civils et leurs biens dans le pays, qu'elles respectent les principes de professionnalisme, de justice, de droits humains et de respect des institutions religieuses et qu'elles agissent sans délai sur cette affaire », insiste-t-il.

Mgr Napeta ajoute que son diocèse « se tient en solidarité avec notre personnel ecclésiastique et la population de la paroisse de Loa (comté de Magwi) qui ont été affectés par cet événement malheureux, et nous réitérons notre engagement indéfectible à poursuivre notre ministère de service, de paix et de compassion malgré ces défis. »

Depuis la signature de l’Accord revitalisé sur la résolution du conflit en République du Soudan du Sud (R-ARCSS) à Addis-Abeba, la paix au Soudan du Sud est restée fragile. Malgré cet accord, les tensions entre les SSPDF et le SPLM-IO ont persisté, alimentées par des rivalités politiques, la question de la succession, des divisions ethniques et des retards dans la mise en œuvre complète du traité de paix.

La situation s’est aggravée au début de l’année 2025, lorsque de nouveaux affrontements ont éclaté entre les deux factions, entraînant des déplacements massifs et de nombreuses victimes.

L’arrestation signalée du premier vice-président, le Dr Machar, suivie de l’arrestation d’autres dirigeants de l’opposition, a exacerbé les tensions dans la plus jeune nation du monde, suscitant des craintes d’un retour à un conflit à grande échelle.

Jude Atemanke

Jude Atemanke est un journaliste camerounais passionné par la communication de l'Église catholique. Il est titulaire d'une licence en journalisme et communication de masse de l'Université de Buea au Cameroun. Actuellement, Jude est journaliste pour ACI Afrique.