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Agir pour mettre fin à ce «calvaire», un prélat plaide auprès des autorités de la RDC au milieu des massacres renouvelés

Réfugiés et personnes déplacées dans la partie est de la République démocratique du Congo. Aide à l'Église en détresse ( AED) Réfugiés et personnes déplacées dans la partie est de la République démocratique du Congo.
Aide à l'Église en détresse ( AED)

Suite à la recrudescence des meurtres dans les villages de l'est de la République démocratique du Congo (RDC), l'évêque catholique du diocèse de Butembo-Beni a appelé les autorités gouvernementales à agir afin de mettre un terme aux souffrances de la population.

Dans un appel enregistré envoyé à l'organisation caritative catholique Aide à l'Église en détresse (AED), Mgr Melchisédech Sikuli Paluku dénonce ces attaques prolongées, affirmant que le peuple de Dieu se sent abandonné dans un pays où les autorités semblent "indifférentes".

Dans le clip vidéo du lundi 18 janvier, l'évêque raconte l'une des attaques près de sa juridiction : "Le week-end dernier, dans une paroisse située à 20 kilomètres de Butembo, une vingtaine de personnes ont été tuées. Elles ont été massacrées. C'est le énième massacre dans le diocèse dans le silence général".

Il ajoute : "Le plus honteux, selon les mots du Saint-Père, est l'indifférence des autorités compétentes. Nous nous sentons abandonnés, mais nous espérons toujours que quelque part dans le monde, au nom de l'humanité que nous partageons, il y a des gens qui s'engageront à changer cette situation".

En évoquant la situation préoccupante dans ce pays d'Afrique centrale, Mgr Paluku attribue aux médias locaux la responsabilité de leur silence alors que la population continue de souffrir.

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"Les gens sont abattus comme des animaux. Personne n'essaie de mettre fin au calvaire que nous vivons depuis des années. Rien que l'année dernière, environ un millier de personnes ont été tuées. Les médias locaux n'en parlent pas ou très peu", déplore l'évêque. 

Depuis des années, les rebelles de la milice des Forces démocratiques alliées (ADF), un groupe originaire de l'Ouganda, ravagent la frontière du pays avec la RDC, une région particulièrement riche en ressources.

Les évêques catholiques de la province ecclésiastique de Kisangani ont décrit l'origine de l'instabilité dans le pays comme "une exploitation abusive des ressources naturelles, des conflits fonciers notamment autour des problèmes des parcs de Lomami et de Garamba, la non prise en compte des besoins des populations locales et l'exploitation de certaines catégories sociales par des groupes d'intérêts économiques et politiques".

Lors de l'une des dernières attaques de cette année, au moins 22 civils auraient été tués lors d'un raid de nuit dans le village de Mwenda, dans l'est de la RDC.

Des responsables locaux et des sources de la mission de maintien de la paix des Nations Unies dans la région ont déclaré que le massacre du 4 janvier avait été mené par la milice de l'ADF.

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C'était la deuxième tuerie en une semaine à frapper la RDC. La veille du Nouvel An, on estime que 25 civils ont été tués dans le village de Tingwe.

L'année dernière, près de 100 attaques distinctes ont été menées dans différentes parties du pays d'Afrique centrale, qui ont fait plus de 1 000 morts, selon Mgr Paluku.

L'évêque blâme les forces de sécurité du pays pour leur incapacité à protéger la population. Les politiciens locaux sont également accusés de s'enrichir aux dépens des civils sans défense.

"Il y a des agents de sécurité qui devraient protéger les personnes et les biens. Cependant, l'État est tombé dans le discrédit. La population de Beni lutte contre cette situation depuis 10 ans et se sent maintenant négligée. Depuis 2014, la situation s'est aggravée et les massacres se succèdent", explique l'évêque congolais dans le clip vidéo. 

Il ajoute : "Les autorités de notre pays passent du temps à discuter pour savoir qui prendra la direction de tel ou tel ministère. Ils veulent tous une part du gâteau. Obtenir le pouvoir et le conserver semblent être les seules priorités. Pendant ce temps, les besoins de la population ne sont pas pris en compte. C'est une situation écœurante".

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Le cri de l'évêque dans le clip vidéo, dit-il, est le cri des pauvres civils qui perdent leurs amis et leurs parents aux mains des bandits alors que les autorités restent indifférentes.

Son objectif, poursuit-il, est d'attirer l'attention de l'Église dans le monde entier sur les souffrances endurées par la RDC en raison de la violence prolongée.

"Nous avons décidé d'exprimer le cri de la souffrance. Nous donnons la parole aux gens de notre diocèse et du pays. Ils m'ont demandé d'enregistrer cette vidéo, et c'est pourquoi je le fais", dit Mgr Paluku dans la vidéo de six minutes dans laquelle il montre des images de corps et des taches de sang sur le sol.

Il ajoute : "Je veux porter à votre attention, et à celle du monde entier, la souffrance des gens. Ils l'ont supportée trop longtemps. Nous espérons que notre cri pourra être entendu. L'Église a toujours écouté notre cri. Mais nous voulons aussi que notre gouvernement agisse et mette fin à ce calvaire".

Agnes Aineah