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En Zambie, la mise en garde des chefs d’église contre la restriction des droits et des libertés

À quelques mois des élections générales en Zambie, les dirigeants des Églises du pays ont, dans une déclaration collective, mis en garde contre la restriction des droits et des libertés des citoyens et des groupes dans cette nation d'Afrique australe. 

Dans leur déclaration collective à l'approche des élections générales du 12 août, les membres de la Conférence des évêques catholiques de Zambie (ZCCB), de l'Alliance évangélique de Zambie (EFZ) et du Conseil des églises de Zambie (CCZ) expriment leur inquiétude quant à l'application sélective de la loi sur l'ordre public (POA), qui vise à protéger la liberté d'association, d'expression et le droit de se réunir.

"La Zambie a connu une situation où la loi sur l'ordre public (POA) a continué d'être appliquée de manière sélective pour réduire la capacité des partis politiques d'opposition à mobiliser et à faire connaître leurs manifestes et pour faire taire d'autres acteurs ayant des opinions contraires à celles du gouvernement et du parti au pouvoir", déclarent les dirigeants de l'Église dans leur déclaration du 19 mars. 

Ils ajoutent : "L'impression que les agents chargés de l'application de la loi étaient partiaux et ne favorisaient que les individus du parti au pouvoir est désormais une réalité qui pousse les membres du parti non au pouvoir à se faire justice eux-mêmes."

Ils expriment leur condamnation de l'application sélective de la loi et de l'ordre en Zambie et expliquent : "Les incidents où la police reste à l'écart et regarde des membres du parti au pouvoir détruire des biens appartenant à des citoyens sont dangereux car ils ont le potentiel d'éroder la confiance réduite que les gens ont dans la protection de la police."

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Les représentants des "trois organes de l'Église mère" regrettent que, parfois, des violences aient été "commises par la police zambienne, qui est censée protéger les citoyens et qui, au lieu de cela, utilise des armes mortelles entraînant la perte de vies humaines".

Bien que la charge de veiller au respect de la loi et de l'ordre dans le pays incombe à tout le monde, les responsables de l'Église affirment que les policiers "ont un mandat spécial pour faire respecter la loi et l'ordre là où la société ne parvient pas à se réguler volontairement".

"Compte tenu des divers intérêts en présence en Zambie, en particulier pendant les élections, le service de police doit rester ferme et impartial à tout moment, s'il veut gagner la confiance de la population", déclarent les chefs d'Eglise dans leur déclaration signée par Mgr George Lungu, Mgr Sauros Phaika et Mgr Paul Mususu de la ZCCB, du CCZ et de l'EFZ respectivement.

Les dirigeants s'inquiètent également de l'incapacité des médias publics à "fournir équitablement une plate-forme à tous les Zambiens, quelle que soit leur affiliation politique, pour qu'ils puissent exprimer leurs points de vue et leurs opinions sur ces derniers".

Faisant référence à l'Institut Panos d'Afrique australe (PSAf) et à l'Institut des médias d'Afrique australe (MISA), les dirigeants chrétiens affirment que la couverture par les médias publics "n'a pas été équitable, car ils ne parviennent pas à éduquer et à informer les citoyens de manière objective, équilibrée et claire".

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Ils condamnent également les mesures de répression à l'encontre des médias privés, affirmant que ces actes portent atteinte à "la liberté d'expression dont les Zambiens sont en droit de jouir".

Ils affirment que la répression du journal Post en 2016, la fermeture temporaire de MUVI TV et de la radio Komboni après les scrutins de 2011, et la fermeture de Prime TV en 2020, "ont envoyé un message clair à tous les médias privés, à savoir que critiquer les décisions et les actions du gouvernement pouvait leur attirer des ennuis."

"Certains journalistes de stations privées qui diffusaient des émissions de tribune téléphonique et d'autres émissions de débat au cours desquelles des points de vue divers et critiques étaient librement exprimés ont reçu des menaces de la part de hauts fonctionnaires et de politiciens du gouvernement et du parti au pouvoir", racontent les dirigeants de l'Église dans leur déclaration de sept pages.

Faisant référence au discours présidentiel du 12 février au Parlement, dans lequel le chef de l'État a déclaré que la politique des médias lancée en novembre 2020 garantira la liberté de la presse dans le pays, les dirigeants des trois organismes religieux affirment que le gouvernement semble reconnaître l'importance des médias.

Toutefois, les chefs religieux disent attendre de voir les mesures concrètes qui seront prises pour garantir la liberté des médias lors des prochaines élections.

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Pour parvenir à la liberté des médias, les dirigeants chrétiens de Zambie appellent les responsables de l'Autorité indépendante de radiodiffusion (IBA) du pays à "montrer qu'ils sont réellement indépendants, efficaces et qu'ils agissent d'une manière juste et protectrice pour tous les médias".

Ils appellent également tous les journalistes du pays à pratiquer un journalisme constructif et pacifique en "évitant le journalisme à sensation et en aspirant toujours à être véridique, équitable et éthique dans leurs reportages".

Ils reconnaissent le rôle essentiel de l'Église dans la défense de la justice sociale, de la gestion des ressources nationales et de la bonne gouvernance et appellent tous les membres du clergé du pays à continuer de prêcher la paix, l'unité et la tolérance avant, pendant et après les élections.

"Rappelez-vous que si nous voulons la paix, nous devons œuvrer pour la justice", affirment les responsables de l'Église dans leur déclaration du 19 mars, ajoutant : "L'Église doit être non partisane et éviter de recevoir des dons qui ont le potentiel de lui faire perdre sa voix prophétique."

Ils expriment leur engagement à dialoguer avec les dirigeants du pays, les membres des partis politiques et les responsables d'institutions telles que les médias et la police zambienne, afin d'assurer "un dialogue significatif qui produira des résultats, de manière à garantir à notre peuple des élections libres, équitables, crédibles et pacifiques".

Magdalene Kahiu