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Monsieur le Président, quelle est votre position sur les LGBTQ+ ? Lettre ouverte d'un évêque catholique du Ghana

Un évêque catholique du Ghana demande au président de la nation ouest-africaine de faire connaître "sans équivoque" et "sans ambiguïté" sa position sur la question controversée des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres, queers et intersexués (LGBTQI+) dans le pays.

Dans sa "lettre ouverte" du lundi 3 avril adressée au président Nana Akufo-Addo, Mgr Joseph Osei-Bonsu relate des incidents au cours desquels le président ghanéen a fait preuve d'incohérence et d'ambiguïté "concernant la question des LGBTQI+", le dernier en date étant sa rencontre du 27 mars avec la vice-présidente des États-Unis, Kamala Harris.

"Je vous écris aujourd'hui en tant que citoyen ghanéen au sujet de trois déclarations que vous avez faites en tant que président de la République du Ghana sur la question des LGBTQI+. J'y trouve des incohérences et je vous serais très reconnaissant de les clarifier pour moi", déclare l'évêque du diocèse ghanéen de Konongo-Mampong dans sa lettre de quatre pages.

Mgr Osei-Bonsu fait référence à l'interview accordée en 2017 par le président Akufo-Addo à Aljazeera et lui reproche de ne pas avoir été franc sur le fait que l'homosexualité "reste en effet une infraction pénale au Ghana".

Interrogé sur les raisons pour lesquelles l'homosexualité restait un crime au Ghana, le président aurait évoqué l'absence d'une "coalition suffisamment forte" poussant à la dépénalisation des actes de même sexe, ajoutant : "Je ne vois pas qu'au Ghana il y ait un courant d'opinion aussi fort qui dise que c'est quelque chose dont nous avons besoin que vous vous occupiez."

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De l'avis de Mgr Osei-Bonsu, le président Akufo-Addo n'a pas répondu à la question posée par Jane Dutton d'Aljazeera.

Le président ghanéen devait faire "référence à l'article 104 du code pénal ghanéen de 1960 qui criminalise les actes sexuels consensuels entre personnes du même sexe", déclare l'ancien président de la Conférence des évêques catholiques du Ghana (GCBC).

Il ajoute que le chef d'État ghanéen "aurait dû profiter de l'occasion pour expliquer au journaliste pourquoi l'homosexualité n'est pas acceptée au Ghana pour des raisons religieuses, culturelles et sanitaires".

Le chef de l'Église catholique poursuit en faisant référence à la conférence de presse du 27 mars que le président du Ghana a tenue avec le vice-président américain dans la capitale du Ghana, Accra, en se concentrant particulièrement sur une question posée par un journaliste du New York Times sur les LGBTQ+.

Il reproche au président Akufo-Addo d'avoir fait des remarques "malheureuses" sur "le projet de loi sur la 'promotion des droits sexuels humains et des valeurs familiales ghanéennes 2021' qui est devant le Parlement" et d'avoir manqué "une belle occasion de corriger Kamala Harris sur sa compréhension des droits de l'homme".

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Dans sa lettre ouverte du 3 avril, Mgr Osei-Bonsu déclare au chef de l'État que le président du Ghana, comprenant que le projet de loi présenté au Parlement a "déjà été modifié" à la suite de l'intervention du procureur général du pays, a été "démystifié" par un organe législatif.

Il poursuit : "Monsieur le Président, votre déclaration selon laquelle le projet de loi n'a été défendu que par "une poignée de députés" est regrettable".

J'aimerais que vous réalisiez que cette "poignée de députés" représentait plus de 80 % des Ghanéens qui abhorrent l'homosexualité", déclare l'évêque de 75 ans, qui dirige le diocèse ghanéen de Konongo-Mampong depuis sa consécration épiscopale en 1995.

Une enquête menée par le Centre africain pour le droit international et la comptabilité (ACILA) a révélé que plus de 80 % des Ghanéens sont opposés à la normalisation de l'homosexualité dans le pays", explique-t-il.

"Votre Excellence, vous avez également ajouté que si le projet de loi était adopté, il devait encore être ratifié par vous. C'est exact, mais j'espère que vous n'envisagez pas de ne pas l'approuver. Si vous le faites, vous et votre gouvernement vous attirerez les foudres d'au moins 80 % des Ghanéens", prévient le chef de l'Église catholique.

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Concernant l'affirmation de la vice-présidente américaine selon laquelle les LGBTQ+ sont une question de droits de l'homme, Mgr Osei-Bonsu déclare que le président Akufo-Addo "aurait dû lui faire savoir qu'en traitant ce projet de loi, le Parlement ghanéen ne viole aucun droit de l'homme, mais affirme ce qui est conforme à la loi et à l'ordre naturels".

Si l'évêque catholique ghanéen admet que les personnes d'orientation hétérosexuelle et homosexuelle bénéficient des droits de l'homme, notamment "le droit à la vie, à la liberté personnelle et à une procédure légale régulière : à la liberté de pensée, d'expression, de religion, d'organisation et de mouvement...", il précise que "les droits des homosexuels en tant que personnes n'incluent pas le droit d'un homme d'épouser un homme ou d'une femme d'épouser une femme".

"Nous devons souligner que les activités LGBTQT ne font pas partie de ce qui est décrit comme les droits de l'homme fondamentaux et ne peuvent pas être incluses dans la liste des droits de l'homme", déclare Mgr Osei-Bonsu, ajoutant que les activités LGBTQT vont "à l'encontre de la loi et de l'ordre naturels".

Il souligne que "chaque droit de l'homme doit être fondé sur des besoins fondamentaux pour soutenir la nature humaine et la survie. Les mariages et les activités entre personnes de même sexe vont plutôt à l'encontre de ce principe de vie et d'existence humaine".

"Pour nous, chrétiens, et vous aussi, Votre Excellence, le mariage homosexuel est moralement mauvais et va à l'encontre du dessein de Dieu sur le mariage", déclare l'évêque catholique.

Il poursuit : "Votre Excellence, faites savoir à Kamala Harris que l'"évangile" de l'homosexualité qu'elle et d'autres Américains nous prêchent en Afrique n'est pas accepté par tous les Américains. Laissez-la finir de convertir ceux qui, en Amérique, n'acceptent pas cet 'évangile' avant qu'elle ne vienne le prêcher ici".

Dans sa lettre ouverte du 3 avril, Mgr Osei-Bonsu félicite le président ghanéen d'avoir fait connaître sa "position sur le mariage homosexuel sans ambiguïté" lors d'un événement organisé le 27 février 2021 dans l'Église de la province d'Afrique de l'Ouest (CPWA).

"En effet, vous avez donné l'assurance, à l'enthousiasme de nombreux participants à la cérémonie (y compris moi-même !), que ce ne serait pas sous votre présidence que les mariages entre personnes de même sexe seraient légalisés", rappelle le chef de l'Église catholique, ajoutant que le président ghanéen avait été catégorique et sans équivoque "dans ce qui pourrait être décrit comme votre position la plus ferme à ce jour".

Les remarques que le président Akufo-Addo a faites dans divers contextes sur la question des LGBTQ+ ne semblent pas faire preuve de cohérence, déplore l'évêque catholique dans sa lettre ouverte de quatre pages du 3 avril, dans laquelle il montre également comment les chefs d'État précédents ont été cohérents et sans ambiguïté sur l'homosexualité et l'orientation vers le même sexe.

Mgr Osei-Bonsu ajoute qu'il "vous serait très reconnaissant si vous (le président Akufo-Addo) pouviez déclarer sans équivoque votre position sur les LGBTQ+. Je le demande parce que de nombreux Ghanéens ne sont pas sûrs de votre position sur ce sujet."

"Président Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, ma question est la suivante : quelle est votre position sur la question des LGBTQ+ ?", demande l'ordinaire local du diocèse catholique de Konongo-Mampong, au Ghana.

Equipe Editoriale ACI Afrique